Avant l'introduction du cheval, le bison était chassé à pied.
On acculait le troupeau jusqu'au bord d'une falaise et les bêtes affolées s'écrasaient au fond du précipice.
De vieux Sioux ont raconté comment ces chasses s'opéraient...
Un homme se propose pour attirer la horde des bisons; il se propose parce qu'il a eu un rêve dans lequel il s'est senti désigné.
Il se sert d'une sorte de porte-voix en écorce pour les attirer, ou bien se déguise lui-même en bison, il se mêle au troupeau qu'il guide jusqu'au ravin.
Au dernier moment, il se dérobe, afin de ne pas se faire écraser ; le rôle est dangeureux. Il requiert du courage , de la force physique, de la force magique...
Les bisons erraient la plupart de l'année , disséminés, et se regroupaient à la fin de l'été en immenses troupeaux ( période de reproduction).
On a comparé le bison à une sorte de magasin général car les Indiens trouvaient TOUT ce qui leur était nécessaire :
-de la viande fraiche ou séchée , des vessies pour des récipients, des tendons pour le fil , des os pour fabriquer des aiguilles ou des outils, de la bile pour assaisonner les aliments ( ) , des peaux dont l'étanchéité les protégeait du froid, des cornes nécessaires à la fabrication des arcs, la bouse elle-même servait de combustible.
Les années de sécheresse , la chasse n'était que fonctionnelle, mais en général l'herbe poussait dru et les troupeaux de bisons noircissaient les plaines.
Le fracas de leurs sabots s''entendaient ( la main sur le sol et le sentir vibrer ) à 30 km à la ronde !!!
La chasse au bison était alors pour les Indiens des Plaines une des composantes de la course à la gloire.Elle procurait la gloire parce qu'elle était dangeureuse, parfois mortelle . Aprés l'introduction du cheval, les Dakotas chassaient torse nu, ils lançaient leur monture au galop, et lâchaient les rênes pour armer leur arc.
Ils se dirigeaient des genoux et s'avançaient près de leurs proies pour que la fléche s'enfonce dans le poitrail de l'animal jusqu'au penne et atteigne le coeur. La marge d'erreur était d'environ 30 cm ! A moins d'1 métre, ils se faisaient empaler par les cornes de la bête; au-delà, ils ne pouvaient lancer leurs fléches avec suffisamment de force.
Tuer un bison d'une seule fléche était salué comme un exploit.
De 2 ou 3 fléches était honorable, mais la honte s'abattait sur ceux à qui il en fallait plus de 5 . Lorsque les femmes dépeçaient les bisons , elles annonçaient publiquemment les hauts faits des chasseurs, et se moquaient publiquemment impitoyablement de la maladresse de certains.
Plutôt que de s'exposer à cette honte, les Indiens s'avançaient au plus près , sans souci de prudence, et décochaient leurs traits d'un seul geste. Ce tour de force aboutissait souvent à la collision du bison et du cheval, et le chasseur était jeté au pied du troupeau . Quelques secondes seulement pour éviter d'être piétiné à mort, en sautant sur son propre cheval ( si debout ) ou en croupe derrière un autre chasseur - il s'accrocahit parfois à la queue d'un bison sur lequel il tentait de se mettre à califourchon .
Les Indiens des Plaines compliquaient à souhait les règles de la chasse, mais il serait faux de croire qu'ils en faisaient un sport. Ils recherchaient le danger parce que leur courage était garant de leur gloire , mais aussi parce que le danger, comme la douleur, fortifie l'âme et rend plus apte à affronter les puissances surnaturelles ;parce qu'en tuant ainsi le bison qu'ils admiraient , ils lui rendaient un hommage. Le bison, animal sacré, ne pouvait être tué que d'une maniére sacrée.
L'introduction du cheval permit à des centaines d'hommes de participer à la chasse. Cette chasse prend, à la fin du XVIIe siécle, les allures d'une grande expédition militaire. Des scouts localisent le troupeau. Les sociétés de guerriers maintiennent ordre et cohésion. Les chasseurs s'organisent comme une armée, en contingents, avec leurs chefs et leurs banniéres...La poursuite dure plusieurs jours; on campe le soir en cercle, avec les Clans du Ciel au Nord, et ceux de la Terre au Sud. La responsabilité de l'opération est énorme : l'approvisionnement de la tribu entiére dépend de son succés. Celui qui assume cette responsabilité a prié pendant des mois, il a reçu une vison qui le désigne. Durant toute la poursuite, il prie, il jeûne et lance force incantation. Il conserve toutes sortes d'objets sacrés: des plumes, des talismans, une pipe spéciale réservée à la chasse au bison.
Les Omahas transportent avec eux un mât sacré, décoré d'emblémes mythiques, qu'un visionnaire désigna un jour, comme le centre de la tribu, le trait d'union entre son peuple et les forces surnaturelles. Ce mât est conservé dans une tente spéciale, gardée par les Sociétés de la Guerre.Les Omahas possédent également une peau de bison blanc, que l'on étend sur le sol, le soir, et devant laquelle les chasseurs déposent des présents.
Le chef de la chasse se contente d'un minimum de nourriture et de sommeil; les chasseurs se déplacent silencieusement, tout sujet de querelle est évité; les gestes sont précis,rapides,efficaces. Lorsque le troupeau est en vue, l'attaque est brusque mais parfaitement coordonnée. Un geste prématuré donnerait l'alarme aux bisons, qui s'enfuiraient avant d'être encerclés. Dans la charge proprement dite, les chasseurs marquent quatre temps d'arrêts rituels avant de se lancer sur leurs proies.
Aprés avoir dépecé les bêtes, on coupe les langues qui sont offertes au chef.
Ce mets raffiné est dégusté sans l'aide de récipient ou de couteau.
Une grande fête conclut la chasse. Les chefs revêtent les dépouilles des bisons, ils fument la pipe sacrée et chantent les priéres du Bison Blanc.
Lorsque la viande est séchée, le mât sacré est peint en rouge et on lui offre des présents.
La tribu entiére danse autour en cercle;
c'est une danse de triomphe ,
c'est une danse de joie,
et le mât, haut dressé,
symbolise l'harmonie de l'univers.
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*Tatanka = bison en Lakota